Lorsque la guerre éclate, Mohammed a cinq, huit, douze, quinze, dix-huit puis vingt ans. Cinq guerres traversent sa jeunesse à Gaza, la dernière n’est toujours pas terminée. Et lorsque l’exil devient la seule voie possible, il écrit. Poète et karatéka de haut niveau, il recueille les voix dispersées, les souvenirs brisés, les silences lourds de celles et ceux restés derrière et les transforme en un théâtre du corps et de la parole, où le karaté se mêle au verbe pour traduire l’inconcevable. Par ses mots, Mohammed reconstruit un territoire : celui de la parole partagée, du geste qui résiste, de la mémoire qui s’obstine à rester vivante.

Le Plus Petit Cirque du Monde, le Théâtre Silvia Monfort et Les Gémeaux, Scène nationale accueillent à tour de rôle l’artiste palestinien Mohammed Al Qudwa lors d’une résidence de deux mois autour de son projet The Humanitarian Corridor, dont Trois Saisons et Un Corps constitue l’une des propositions performatives. Cette étape de création croise témoignages, questionnements personnels et mémoire collective pour donner forme à une histoire théâtrale du déplacement, construite à partir d’expériences multiples. L’art y devient un outil de soutien psychologique, un moyen de dire l’indicible et d’ouvrir un espace de réflexion sur la condition palestinienne. Trois Saisons et Un Corps est ainsi à la fois une tentative de compréhension et un acte de résistance, où les mots et le théâtre deviennent des instruments pour témoigner, relier les expériences et faire exister une mémoire vivante face à l’exil et à l’incertitude.

Crédit photo © Raphael Rodrigues